Pialat, Costa-Gavras et Guibert…

Qui dit météo avantageuse, dit terrasses des cafés… et aussi peu de cinéma que d’écriture. Place donc à de courts textes sur deux films qui m’ont particulièrement marquée : A nos amours de Maurice Pialat, revu avec la même déchirure au cœur que la première fois ; et Clair de femme de Costa-Gavras, adaptation tout en finesse du roman éponyme de Romain Gary. Sans oublier le point sur les sorties du mois et surtout un retour sur le poignant A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, d’Hervé Guibert.

A nos amours, Maurice Pialat, 1983, 100 mn.

C’est peut être le plus beau film de Pialat. Sandrine Bonnaire est magnifique dans ce premier rôle. On comprend immédiatement en la voyant qu’être actrice, on l’est ou on ne l’est pas. La manière dont Pialat décrit la vie de famille ou plus précisément les rapports humains est d’une vérité éclatante : tout n’est qu’incompréhension entre les êtres, ce qui ne signifie nullement qu’il n’y a pas d’amour, au contraire… La violence ne semble aller sans l’amour, et vice versa.
Alors comment faire ? On se heurte les uns aux autres, à l’image de Suzanne. C’est en cela que ce film est fort, secoue de l’intérieur. Suzanne c’est nous, un peu.

Clair de femme, Costa-Gavras, 1979, 105 mn.

Désespéré, Michel erre dans les rues. Cette nuit, sa femme va mettre fin à ses jours afin d’échapper à la maladie. Au gré du hasard, il va faire plusieurs rencontres dont celle de Lydia. Il voit en elle une sorte d’échappatoire, mais la vie de Lydia s’avère assez compliquée.
Costa-Gavras dépeint dans ce film la rencontre de deux êtres en proie à la détresse, leur attachement réciproque… un peu comme si chacun pouvait sauver l’autre. Romy Schneider et Yves Montand sont parfaits, ils donnent toute l’émotion possible à la rencontre de ces deux souffrances. C’est un film tout en finesse. Beau et triste à la fois. C’est toute la complexité de la vie qui est présentée ici. L’espoir des désespérés.

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👉 Retour sur les films sortis en mars 2019

La Flor – 3, Mariano Llinás, 2019, 204 mn ⭐⭐⭐⭐
La Flor – 1, Mariano Llinás, 2019, 210 mn
⭐⭐⭐⭐
Us, Jordan Peele, 2019, 116 mn ⭐⭐⭐⭐
Nos vies formidables, Fabienne Godet, 2019, 117 mn ⭐⭐⭐⭐
Compañeros, Alvaro Brechner, 2019, 122 mn ⭐⭐⭐⭐
La Flor – 2, Mariano Llinás, 2019, 190 mn ⭐⭐⭐
Les étendues imaginaires, Siew Hua Yeo, 2019, 95 mn ⭐⭐⭐
C’est ça l’amour, Claire Burger, 2019, 98 mn ⭐⭐⭐
Ma vie avec John F. Donovan, Xavier Dolan, 2019, 123 mn ⭐⭐⭐
Le mystère Henri Pick, Rémi Bezançon, 2019, 100 mn ⭐⭐⭐
Boy erased, Joel Edgerton, 2019, 115 mn ⭐⭐⭐
Rebelles, Allan Mauduit, 2019, 87 mn ⭐⭐⭐
Synonymes, Nadav Lapid, 2019, 123 mn ⭐⭐
Bêtes blondes, Maxime Matray et Alexia Walther, 2019, 101 mn ⭐⭐

 

A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, Hervé Guibert, Gallimard, coll. « Folio », 1990, 284 pages.

Il est des écrivains que l’on a tendance à oublier, de manière totalement injustifiée. Tel est le cas d’Hervé Guibert, écrivain et journaliste qui a pourtant offert aux années 1980 des textes remarquables, à l’écriture déchirante. (Re)découvert à la faveur de la pièce de Christophe Honoré Les Idoles, où six des hommes qui l’ont marqué dialoguent par-delà la mort, Guibert s’impose comme un écrivain intense, qui mêle sa vie à son art en un pas de deux poignant.

© Gallimard

A l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, dans lequel il révèle être atteint du sida, sera son plus grand succès. Suivi du Protocole compassionnel et de L’Homme au chapeau rouge, l’ouvrage dévoile sans faux semblants ce qu’est la vie d’une personne atteinte de cette maladie, la souffrance physique et morale, la peur d’avoir condamné des êtres chers, la perte d’amis irremplaçables, le regard d’autrui, sec et implacable. Mais aussi cette certitude de mourir au plus tard dix ans après incubation du virus ; fin des possibles, abolition de tout futur comme de toute responsabilité.

Avec son écriture de soi précise, Guibert parvient à faire ressentir au lecteur aussi bien la détresse que le soulagement éprouvés lors des rendez-vous de plus en plus fréquents avec le médecin.

Énumérant ses souvenirs de la fin des années 1980 au début de la décennie suivante, l’auteur propose aussi une étude sociologique, celle des artistes et/ou intellectuels homosexuels de ces années-là, touchés par une maladie, sorte de malédiction, qui va balayer tout un groupe. Si le livre demeure aujourd’hui un témoignage poignant, c’est certes pour sa vérité mais aussi pour le travail d’écriture de son auteur. Côtoyant la mort à chaque page, les mots de Guibert se lisent la boule au ventre, la bouche sèche. Une lecture aussi intense que revigorante. Et un écrivain remarquable, à lire et à relire.

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